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Complainte

Dés mon entrée dans la maison , elle a dit que j’étais beau, mais qu’il allait falloir me couvrir car j’étais beaucoup trop clair.

Mon dieu, étais-je tombé dans une famille raciste ?

Finalement après quelques semaines à peine, j’ai vu arriver un tout petit bonhomme d’à peine deux kilos et là j’étais heureux car toutes les deux heures je les retrouvais pour la tétée.

J’ai assisté avec beaucoup d’émotion à ses premiers pas, à ses tentatives pour grimper sur moi, puis avec tout de suite moins d’émotions, enfin pas les mêmes, à son premier vomi sur moi. J’ai enfin compris pourquoi on avait recouvert mon beau tissus de nubuck jaune d’une immonde housse de couette bleue ( la déco c’était pas leur truc).

J’ai aussi rencontré la belle-mère de la famille, une personne très drôle, 45 kilos toute mouillée mais persuadée d’être énorme. Du coup, lorsqu’elle dormait sur moi la nuit, je faisais grincer mes ressorts que je lui plantais savamment dans les côtes pour la convaincre qu’en effet, elle était très lourde.

Quelques mois plus tard , on m’a transporté la tête en bas, les ressorts à l’air, vers une autre demeure et là j’ai souvent hébergé la mère de famille qui était étrangement devenue une grosse baleine.

Puis, est arrivé un second petit bout, toujours d’à peine deux kilos, mais celui-là était si souvent au sein de sa mère qu’elle ne venait pas forcément sur moi pour l’allaiter, elle faisait tout d’une main, son fils accroché au sein.

Le premier avait bien grandi et me sautait allègrement dessus avec ses chaussons et ça faisait crier tout le monde (surtout mes ressorts en fait).

Et une terrible aventure m’est arrivée, j’ai voyagé pendant près de trois mois dans un bateau et laissez-moi vous annoncer que même les plus beaux canapés dans mon genres souffrent du mal de mer ! En plus, croyez-vous qu’ils m’auraient payé une cabine ? Même pas, trois mois au fond de la cale aux côtés de monsieur Lit ce crâneur qui me disait tout le temps que c’était lui le préféré de la famille.

J’ai envisagé de moisir sur place pour manifester mon mécontentement, mais je ne me suis pas résolu à l’autodestruction, j’étais bien trop malade de toute façon.

Arrivé sur terre, bien mal en point, mes ressorts prêts à rouiller de tant d’humidité dans la cale, j’ai cru que mon malheur allait enfin s’arrêter, mais pensez-vous, les monstres avait bien grandi pendant mon absence et leur principal jeu était de me sauter dessus.

Le petit était le plus démoniaque car en plus, il s’oubliait régulièrement sur moi, et je ne compte pas les crottes de nez, collées par les deux compères, discrètement sur mon dossier.

Je me suis bien vengé de temps en temps en les assommant grâce à mes durs accoudoirs mais ils reviennent constamment à la charge.

Je ne veux plus rester ici, les enfants sont maintenant de grands gaillards qui ne savent pas s’asseoir correctement, me montent dessus, me secouent les coussins, me torturent les ressorts.

Le père n’est pas beaucoup mieux à vrai dire, il me remet régulièrement ma couverture en lâchant des jurons contre ses lardons, mais au moment de s’asseoir il laisse violemment tomber son postérieur sur mon pauvre coussin droit et croyez moi, il s’est sacrément enrobé depuis que je l’ai rencontré.

La mère est la plus douce avec moi, elle est divinement légère, ne me pète quasiment jamais dessus contrairement aux autres et lorsque ça lui arrive, cela sent évidemment la rose ou le mimosa.

Elle a tout de même une fâcheuse tendance à dire que je suis sale ( la faute à ses mioches hein!) et que je lui casse le cou, mais c’est parce que dès qu’elle s’installe sur moi elle s’endort profondément, la tête tordue sur mon accoudoir.

Mais même si c’est ma préférée de la famille, je veux partir !

Ça va faire neuf ans que je suis dans cette famille et je lance un SOS, s’il y a une association de défense des canapés, pitié contactez là je veux partir !

Je suis sûr que je ferais très plaisir à un petit couple de retraités ( étanches, merci d’avance).

S’il vous plait, aidez-moi !

( Un canapé fatigué)

 

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La complainte de la cafetière

 

De :  la cafetière noire de chez les « Poizon »

 

 

A : syndicat des cafetières en colère.

 

 

Chers membres du syndicat

Lorsque la famille Poizon est arrivée dans notre rayon l’an dernier, toutes mes camarades ont reculé terrorisées, chacune essayant de se planquer derrière l’autre, suppliant le dieu « Torré » ( facteur de son prénom) de ne pas être choisie.

Moi, petite cafetière noire, jeune et motivée, je n’ai pas reculé ! Après tout n’avions-nous pas été envoyées sur cette planète pour régaler les terriens de notre liquide chaud et amer ?

J’ai épousseté mon emballage et sautillé sur mon rayonnage jusqu’à ce qu’on me remarque et que miracle, les Poizon m’embarquent dans leur caddie.

Je ne me suis pas longtemps demandé pourquoi mes copines me chuchotaient des «  courage, sois forte » ou pire encore «  t’es complétement maso ma pauvre », j’ai très vite compris, je suis tombée dans une famille de FOUS !

Non mais rien que l’air hagard de la Poizon le matin au réveil, ça aurait du me mettre la puce à l’oreille ! Les cheveux en bataille, l’oeil vitreux, elle me remplit d’eau en bougonnant que je ne suis pas pratique car on n’y voit rien ( hé ouvre les deux yeux patate ai-je envie de lui crier), puis elle m’allume et là commence la danse de la « coffee-addict Girl ». Toutes les 15 secondes elle vient voir si j’ai terminé de faire couler son café, elle peste que je ne suis pas rapide, repart et reviens 15 secondes plus tard, trépignant d’impatience dans son pyjama froissé avec ses grosses marques d’oreillers sur la joue.

Un matin sur deux elle se sert son café avant que je n’ai terminé d’envoyer toute l’eau et un matin sur deux elle fait « Pouaaahhh c’est trop fort ».

Au début j’ai cru que les humains n’apprenaient rien de leurs erreurs puisque c’est une multi-récidiviste de la chose, mais en fait c’est juste elle, la Poizon, qui n’a toujours pas compris que si elle voulait que je coule plus vite il suffirait de faire moins de café à la fois et que si elle ne voulait pas de café ultra fort il fallait être un tout petit peu patiente et attendre la fin de mon travail.

Parfois ils reçoivent de la famille, là je suis bien fatiguée car je travaille encore plus mais je rigole bien aussi… Il y a le gros barbu qui me prépare tous les soirs et qui de temps en temps va jusqu’à m’allumer dans la foulée. Là c’est le sketch assuré parce que moi, pauvre machine disciplinée,même si je sais qu’il ne veut pas de café à cette heure là je m’ exécute ! Et quand par pitié je grogne un coup pour montrer que j’envoie l’eau chaude sur le café frais, réalisant son erreur il râle, il bougonne, souvent même j’apprends de nouveaux jurons et je rigole jusqu’à m’en décoller le filtre !

Sinon il y a aussi la Mamie à lunettes qui, dès qu’elle me voit, demande à la ronde s’il ne serait pas temps de me détartrer…Je suis un peu bruyante certes , mais ça n’est pas une raison ! Est-ce que je la traite d’entartrée moi ???

En plus question bruit, ici on est servi, la famille Poizon héberge deux petits animaux appelés monstroux qui crient et hurlent en permanence. Heureusement il ne m’approchent jamais car il parait que je les brûlerais ce qui, je dois le reconnaître, m’a traversé la résistance depuis qu’ils m’ont DE-FI-GU-REE ! ( photo jointe, z’avez-vu cette honte, moi petite Melitta noire et classique, ornée de ces horribles autocollants)

Mais tout cela n’est rien comparé au pire membre de la famille : The Poux ! Lui c’est un fou-furieux, quand il est là il me fait bosser non-stop quelle que soit l’heure ! J’ai passé des nuits entières à lui faire du café sans jamais un instant de repos, sans jamais un petit mot de remerciement,jamais un geste tendre…

Lui aussi marmonne que je ne suis pas pratique à remplir, et pourtant si je devais lui facturer mes heures supplémentaires, peut-être qu’il changerait de ton, car je n’ai pas beaucoup de collègues cafetières qui bossent jour et nuit !

Donc chers membres du syndicat je vous supplie par la présente de mettre fin à mes souffrances et de m’envoyer une remplaçante ! Je n’en peux plus de cette famille de fous, pour me venger, régulièrement je surchauffe et là ils font la grimace en disant «  pouah ! café bouillu, café foutu ! »…
Sérieusement vous ne pouvez pas me laisser plus longtemps chez ces zinzins qui ne savent même pas conjuguer le verbe bouillir !

 

Chaque nuit je pleure tant que je vais finir par m’entartrer pour de bon, j’ai des idées aussi noires qu’un expresso, je sens que ma résistance va lâcher… Pitié, sortez-moi de là, remplacez-moi par une Tassimo gagnée chez Chocoladdict !

 

 

La cafetière de la famille Poizon, en pleine dépression.