Cher cerveau

Si je t’écris aujourd’hui c’est parce que clairement, ça ne va plus du tout entre nous.

J’ai accepté depuis longtemps ton inaptitude totale aux sciences des mathématiques, en particulier à la géométrie dans l’espace, j’ai géré du mieux que je pouvais cette incompétence que tu as gentiment compensé par ton amour des mots, bons, drôles, doux ou durs. Et surtout comme j’ai terminé l’école, ça va beaucoup mieux de ce côté là. J’ai calculé ma première aire dans la « vraie vie » à 40 ans, juste pour me prouver que tout ce qu’on m’avait infligé en primaire et ensuite, n’était pas totalement inutile ( en même temps il suffisait juste de m’apprendre l’aire vu que je n’ai pas utilisé le reste..hum)

Mais là, je t’avoue que je suis au bord de la demande de divorce en ce qui te concerne.

Qu’est-ce que ça veut dire de mouliner comme un malade tous les soirs au moment où je souhaite dormir ?

20h30 je couche les enfants et je me dis que ENFIN je vais pouvoir me coucher tôt, j’ai attendu ce moment toute la journée parce que je suis crevée, je termine ce que j’ai à faire et 21h30 je saute délicatement (comme une patate donc) dans mon lit.

Comme TU es incapable de me laisser dormir sans que je lise (bon ok, j’aime bien ça aussi), je bouquine un peu et puis, comme je suis vraiment crevée, je suis raisonnable (ne ris pas, ça m’arrive parfois), j’éteins assez rapidement et là, TU commences ta java.

« Est-ce que tu crois que c’était une bonne idée de mettre le lave-vaisselle en route pour la nuit alors que ce matin il a inondé la cuisine ? » « Je serais toi, je me leverais pour vérifier qu’il n’y a pas une piscine dans la cuisine » ( TU n’est pas moi mais je me lève quand même).

« Il ne faut pas oublier de payer la facture de «banane », d’appeler le ramoneur, de trouver les gants d’hiver de Petit monstrou etc… » ( toutes ces choses auxquelles TU devrais me faire penser dans la journée, mais non, tu me fais ça le soir, lorsque je suis couchée, du coup je me concentre pour ne rien oublier le lendemain et je ne m’endors pas)

Comme je te connais bien, je me tourne dans mon lit et je visualise ma place préférée au monde, un endroit où je savais me détendre… voilà j’y suis et tu te tais ENFIN (genre deux minutes quoi)

« Tiens si tu écrivais ça pour le blog ? »

Et là, arrive un texte fluide, bien écrit drôle dont malheureusement je n’aurais aucun souvenir le lendemain (tu le fais exprès ce n’est pas possible autrement). J’ai déjà essayé de me lever précipitamment pour noter, renversant au passage la pile de romans au pied de mon lit, mais évidemment, les mots ne viennent plus aussi facilement, le texte me paraît immédiatement insipide… je me recouche et TU recommences !

« Et pour ton roman, ça serait bien de faire ça et ça » (lequel ? Non parce que les romans je sais les commencer, c’est les terminer qui pose un peu problème et là, clairement TU pourrais filer un coup de main de temps en temps).

« Et pourquoi tu n’écris pas des histoires pour enfants ? » (parce que même ça je n’en suis pas capable connard ! – Oui à ce stade du non-endormissement je suis vulgaire avec mon cerveau-)

A force que mon cerveau mouline dans tous les sens « penser à faire ci » «  tu devrais faire ça » etc je commence à avoir mal à la tête … ça fait deux heures que je suis allongée dans le noir sans pouvoir dormir !

Je sais bien que parmi les idées que tu me souffles, les pensées que tu m’envoies il y a du bon : des projets, des trucs positifs, mais POURQUOI ne fonctionnes-tu pas aussi vite dans la journée ?

Je dois être un animal nocturne en fait …

Parce que les soirs où je m’endors tôt, trop tôt car, épuisée par tes élucubrations permanentes, tu me réveilles vers 3h30.

Là c’est un autre délire, tu me rappelles TOUT CE QUI VA MAL et si par bonheur tout va à peu près bien, tu me suggères TOUT CE QUI POURRAIT ALLER MAL et ça fait un paquet de choses.

Je tourne, je retourne, j’essaie de positiver, je revois les visages de mes monstroux mais paf tu me rappelles à quel point mes relations sont compliquées en ce moment avec Grand Monstrou, ou bien à quel point je suis inquiète pour mon Petit Monstrou qui ne rentre pas dans le moule…

Ensuite tu me rappelle que les gens que j’aime ne sont pas éternels, que Monsieur Poux à force de tirer sur la corde risque gros pour sa santé, que Papounet et Mamina ne sont plus tout jeunes, ou que ma bonne amie qui prenait si bien soin d’elle et de ses enfants, lutte toujours contre les effets secondaires de sa bataille contre la leucémie et que c’est totalement injuste.

Une fois que tu m’as bien plombé le moral, je me lève, épuisée et bien peu motivée, loin les jolis textes que tu me soufflais la nuit précédente, juste l’idée que A CAUSE de toi, je n’ai encore pas mon compte de sommeil, que je vais me traîner toute la journée, que je vais avoir du mal à être patiente avec les enfants et que la nuit prochaine TU vas me faire culpabiliser pour ce manque là.

Autant te le dire tout de suite, si tu continues ainsi je te divorce et je m’achète un autre cerveau plus sympathique.

Tiens par exemple, un qui ne me fera pas croire que la nicotine est mon amie. Un que je ne serais pas obligée d’endormir de temps en temps à coups d’apéros pour pouvoir me reposer, parce que bon, c’est sûr on dort « mieux » mais ensuite c’est mon foie qui demandera le divorce !

Ah oui et pendant qu’on y est, comment se fait-il que TU saches parfaitement ce qu’il faut manger pour avoir la ligne, et être en bonne santé et que TU me recommandes régulièrement de tomber dans la boite de chocolats, de bonbons, d’ajouter de la crème fraiche etc. ?

Je pense sincèrement que tu n’est pas bien dans ma tête, que tu devais être le cerveau d’une autre personne et que nous ne sommes pas faits pour nous entendre.

Je te vois bien ricaner dans ton coin en te disant que la dernière fois que j’ai voulu changer quelque chose c’était mes lombaires et que la médecine m’a lâchement laissée tomber en m’expliquant que c’était impossible.

Fais gaffe, je vais bien trouver une solution pour te mâter espèce de cerveau hyperactif la nuit et incompétent le jour ! Je vais aller me faire hypnotiser, je vais te reprogrammer, te faire enfin fonctionner, pas comme tu le devrais mais comme JE le souhaiterais !

Non mais oh !! c’est qui le chef ici ?

Béa l’insomniaque, épuisée…

conference-cerveau-villecresnesCher

7 réflexions sur « Cher cerveau »

  1. Il faut voir un réparateur de cerveau, il suffit juste de le recaler, pour qu’il fonctionne le jour et non la nuit. Gardes le, avoir un cerveau qui fonctionne en décalé c’est mieux que d’être écervelée.

  2. J’ai un cerveau à peu près conçu comme le tien. J’ai pu soulager une partie des « to-do list » nocturnes avec un dictaphone (enfin mon téléphone transformé en dictaphone). Pour le reste, l’inquiétude pour l’entourage, tout ça… Pas de solution, mais ça peut aider d’en parler, de partager. Bref, je t’ai entendue et je n’ai qu’une chose à dire : et si tu pensais un peu à toi ?

  3. Le cerveau est une sale bête indomptable, capricieuse, égoïste et perverse !!
    C’est là que le modérateur imaginaire rentre en jeu… Celui qui te permet de t’enfuir loin de tout, durant un instant, quelques minutes ou quelques heures. 🌸

  4. Le cerveau est productif le soir, il m’arrive fréquemment de commencer à écrire des billets de blog : d’ailleurs, il m’est déjà arrivé de me relever pour mettre sur papier ces fameux billets, histoire de ne pas perdre l’inspiration ! Je te laisse, voici mes deux amis en blouse blanche qui arrivent. Bon week-end !

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