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La terrasse ( rediff)

Une ptite rediffusion aujourd’hui pour celles qui n’auraient pas lu ce billet… désolée pour celles qui le connaissent déjà, je cours après le temps et malgré beaucoup de petits billets en préparation aucun n’est encore prêt à être diffusé…
Bonne journée 🙂

Elle aimait cette maison plus que tout, cette terrasse ombragée le matin, ensoleillée l’après-midi, c’est là qu’elle s’installait pour prendre son thé, réfléchir, se reposer et bien sur écrire ses nombreuses lettres.

Comme si l’inspiration poussait dans les arbres du jardin et circulait en même temps que l’air frais qu’elle respirait, chaque fois qu’elle venait ici, elle écrivait des dizaines de lettres.
Désuet me direz-vous à l’heure des SMS, d’internet et même de notre bon vieux téléphone, mais elle aimait sentir la plume glisser sur le papier, et elle aimait plus que tout imaginer la tête de ses correspondants à la lecture de ses mots soigneusement choisis.
C’est ici qu’elle avait écrit son premier roman, intégralement à la plume, c’est ici aussi qu’elle avait conquis son premier mari, ici qu’elle l’avait répudié, renvoyé à ses vices et ses multiples défauts.
C’est ici qu’elle avait commencé à harceler la maitresse de son second mari, qu’elle l’avait poussé à la dépression sans même déguiser son écriture, en oubliant tout de même d’apposer sa signature à cette correspondance malsaine et à sens unique, qu’elle avait initiée. Elle avait ensuite reconquis ce mari infidèle, lui écrivant des lettres d’amour beaucoup plus inspirées par l’amour des mots que par celui de l’individu en question.
Mais ce matin la plume restait immobile, ses pensées s’égaraient et l’inspiration semblait la fuir…
Ce matin, elle devait écrire l’éloge funèbre de sa fille unique et sa main, son esprit, son cœur s’y refusaient. Elle alignait trois mots puis froissait la feuille trempée de ses larmes. Elle reprenait courage, commençait une phrase, barrait, rayait et déchirait…
Elle ne sentait plus la quiétude de la terrasse, elle n’était plus apaisée par les arbres du jardin, les chants des oiseaux, la douce brise printanière qu’elle aimait tant.
Lorsqu’enfin elle écrivit : Ma chérie, ne t’inquiète pas, j’arrive bientôt… elle termina la tasse de poussière de cyanure qu’elle s’était procurée auprès d’un collectionneur de minéraux, elle reposa sa chère plume et attendit patiemment…

Ce texte est une participation au quatrième jeu d’écriture initié par Madame Kévin et Lizly avec une superbe photo fournie pour l’occasion par Thé Citron